jeudi 7 mai 2015

Invité à la « journée de l’Adri 2015 », dédiée à Adrien, afin de dédicacer mon livre « A notre Tour » consacré au 100ème Tour de France, j’ai pu mesurer le monde qui sépare Lippini de Le Pen

Prononcez Lippini plutôt que Le Pen

J’aurais pu céder à la tentation d’évoquer les secousses qui agitent la famille Le Pen.
Il y a, en effet, quelque chose de fascinant à voir ce vieillard haineux gesticuler devant une forêt de caméras pour déverser son venin. Il accuse sa fille de félonie, il entend la priver de son nom de famille, il la juge, la moque, la condamne, la déshérite… Si les forces lui revenaient subitement, il n’hésiterait pas à la jeter hors de la maison familiale – Entendez par là le Front national qu’il a créé – pour reprendre la place de numéro un qui lui manque tant.
Il y a aussi quelque chose de troublant à assister à cette grande messe médiatique où l’on se précipite de toutes les agences, de tous les studios, de toutes les rédactions pour recueillir les paroles empoisonnées d’un vétéran de la politique, guetté par la sénilité. Quitte ensuite à le vilipender pour quelques dérapages verbaux dont il a le secret et qui ont nourri ces micros avides de scoops malsains.
Mais en cette période de vacances scolaires, il est de loin préférable de vous parler de Françoise et Gilbert Lippini, un couple de Corses de la région de Bastia. Des gens simples, lumineux, à la générosité silencieuse et dont la grandeur d’âme vous réconcilie d’emblée avec la nature humaine. L’une de ces rencontres de hasard qui vous inonde de bonheur, un beau matin, parce que vous vous sentez spirituellement en harmonie et surtout plus riche que la veille.
M. et Mme Lippini ont perdu leur fils en 2009. Une route nationale un peu pourrie, une bagnole hors de contrôle, une conductrice socialement hors-piste, l’accident imbécile et cette nouvelle en forme de condamnation pour l’éternité : « Adrien est mort sur son vélo, à l’âge de quinze ans ». Ce vélo, acheté par ses parents, qui lui promettait une belle carrière de sportif.
Françoise et Gilbert auraient pu en vouloir à la terre entière, à fortiori à cette femme qui avait lâché son volant pour récupérer la tong coincée dans les pédales avant d’entamer son funeste zigzag. Ils auraient pu aussi se réfugier dans leur douleur, enfermés à double tour dans une espèce d’attente désespérée. Ils ont, au contraire, choisi de se tourner vers les autres et d’entamer un long combat pour doter la Corse de pistes cyclables et pour sensibiliser les cyclistes mais aussi surtout les automobilistes à la sécurité routière et à la vulnérabilité d’un deux-roues.
Leur association, que l’on peut résumer sous le titre « Je ne suis pas qu’un vélo, je suis aussi une vie » ne fait pas la une des journaux. Elle n’intéresse guère les politiques parce que le message est peu porteur auprès de l’opinion publique. Elle n’est même pas encore reconnue d’utilité publique. Mais les paroles prononcées par Françoise dans chaque école, juste pour prévenir ces jeunes du danger qui les guette, par exemple à rouler sans casque même si Adrien le portait toujours, sortent du cœur et s’envolent vers des sommets auxquels les Le Pen, père ou fille, n’auront jamais accès.
André Soleau


Papier écrit par André Soleau auteur de l'ouvrage "A NOTRE TOUR".
VOUS POUVEZ RETROUVER SON BLOG A L'ADRESSE SUIVANTE:
www.andresoleau.com/


 

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